Aujourd’hui, j’ai été au collège toute la journée, pourtant je n’ai pas vu un seul de mes élèves.
Aujourd’hui, c’est moi qui étais assise avec mes feuilles et mes stylos de toutes les couleurs.
Aujourd’hui, j’ai pris le temps d’apprendre, de me remettre en question, de bavarder en chuchotant, de ricaner un peu et, aussi, de me perdre dans mes pensées de temps en temps.
C’était un jour de formation.
Le premier de l’année pour moi alors qu’on arrive en bout de course.
Malgré tout, il arrive au bon moment; je commence à m’essouffler, à sentir la nostalgie de fin d’année s’installer, la panne d’inspiration me guetter et en même temps c’est la course folle des conseils de classe, des bulletins et des orientations. Alors dans cette schizophrénie de tous les instants, une pause s’impose.
Ils sont rares les jours de formation vraiment inspirants et je suis ravie d’avoir vécu cette journée. Celle-ci, je dois dire m’a un peu remuée.
Six heures aujourd’hui et six de plus la semaine prochaine: un temps court et long à la fois, nécessaire à coup sûr, parfois rude, parfois motivant.
Je crois que lors d’un « stage », un avec un réel impact, il y a plusieurs étapes par lesquelles on passe et que chacune d’elle peut se lire dans les yeux de celui qui les traverse.
- l’excitation: l’ouverture infinie des possibles. Soudain, un coup de frais vous fouette le visage, ça réveille. On se tient plus droit sur sa chaise, on écrit frénétiquement pour ne rien oublier. On rêve.
- l’inquiétude : que faire de ce vent frais. Est-ce une illusion momentanée ? L’attrait de la nouveauté ? Pourrons-nous en tirer quelque chose ? Le faire grandir et évoluer ?
- la remise en question: mais alors qu’est-ce que je faisais jusque-là ? Pourquoi je n’avais pas vu les choses comme cela alors que là, sous mes yeux, d’autres me prouvent que c’est possible ? Est-ce que je sers à quelque chose ? Est-ce que quelqu’un retire quelque chose de ce que je veux apporter ?
Aujourd’hui c’est presque au bord du vertige que ce sentiment m’a portée. Comme si je me trouvais sur un ponton au dessus de l’eau, en équilibre. Le coup de vent est frais presque froid. Les questions sont nombreuses.
Et puis, la lumière.
Une notion qui émerge au dessus des autres, une solution au problème, une toute nouvelle perspective, l’envie très forte de tester de nouvelles choses, de travailler à plusieurs, de faire entrer d’autres matières dans sa classe, de co-animer, de bouger la disposition de la classe, de voir d’autres aussi partants que vous.
Alors sur le ponton on n’est plus seul.
Ce n’est pas grave d’avoir le vertige puisque nous sommes une équipe, il suffit de se tenir par la main pour ne pas tomber.
Vivement la suite.
N.B: citation du titre extraite d’un pneumatique envoyé par Camus à Maria Casarès.