Il y a quelques semaines je reçois un ordre de mission m’indiquant que le séminaire « devoirs faits » se tiendra le 29 janvier. Comme il ne me serait jamais venu à l’idée de m’inscrire à ça, je vais voir la cheffe adjointe pour lui demander des explications:
-Ah oui, me dit-elle, ce n’est pas un stage c’est un Séminaire Académique. Je vous y ai inscrit et j’y vais aussi d’ailleurs.
Un peu coincée et un peu dégoûtée de passer toute la journée de mercredi en stage alors que je n’avais que deux heures de cours, je me rends au dit séminaire.
Non mais c’est quoi ce truc ?
500 personnes réunis à Sup de Co, pardon Montpellier Business School (profs, CPE, chefs, inspecteurs, DASEN…) pour assister à des conférences. Petits fours et buffet compris.
Je rentre dans le hall bondé en me demandant ce que je fais là au milieu de tout le gratin de rectorat. Tout le monde est venu accompagné de collègues et de son chef. Je suis seule et j’ai cherché ma cheffe toute la journée, sans succès.
Et là, on me saute dessus: d’anciens collègues ! Ouf ! Mon syndrome de l’imposteur commençait à me faire des auréoles sous les bras… On a bien eu le temps de se raconter les derniers potins parce que le bazar qui devait commençait à 8h30 n’a commençait qu’une heure plus tard.
Je me demandais qui était cette dame assise dans un fauteuil sur scène qui faisait semblant de ne pas voir que tout un amphi l’attendait. C’était la conférencière, chercheuse au CNRS de Paris.
Puis annonce: « Mme la rectrice s’excuse, elle a été appelée à Paris. Hier soir. »
Si un de mes élèves m’avait sorti un truc pareil, je peux vous dire qu’il aurait été bien reçu.
Mais bon, l’éducation nationale a déposé le « fais ce que je dis pas ce que je fais », du coup on ne peut rien faire sinon on paye des droits à la SACEM.
Bon, je vais vous passer mes envolées sur les stages. C’était hyper-méga-giga intéressant. J’ai envie de tout tester et de tout refaire comme d’habitude. Ils ont réussi à me faire croire que j’allais penser mes progressions sur devoirs faits. Bref c’était top.
La première conférence s’est quand même terminée sur une question d’une CPE qui demandait:
‘Les dispositifs que vous présentez sont fabuleux et passionnants. On est tous conscients que nos pratiques ont besoin d’évoluer et elles évoluent pour beaucoup. Mais, voyez-vous, je suis CPE d’un établissement de 660 élèves. Je suis toute seule. Et mes collègues, ils ont 30 élèves par classe et on n’arrête pas de leur sucrer des heures et des postes. Certains enfants ne savent ni lire ni écrire en 6e. On ne parle même pas des troubles dys et des TDAH. Est-ce que le système est conscient qu’il nous demande de fonctionner uniquement sur nos ressources propres sans jamais donner les moyens de la réussite ? »
C’était le DASEN qui tenait son micro. J’aimerais croire que lui aussi a eu des auréoles sous les bras. Mais j’en doute.
C’est vrai quoi, on pourrait peut-être arrêter à un moment de croire que ce sont les profs qui cassent des élèves dans un système savamment pensé pour broyer les plus fragiles…