Où j’ai été inspectée

« Et puis le repas de midi a été un beau moment de solidarité. Mes collègues étaient vraiment là à m’encourager, à me rassurer, on a mangé du chocolat… c’est bon d’être membre d’une équipe.

-Mais attendez… tous vos collègues étaient là en soutien pour… votre inspection ? 

-Ben oui, ce n’est pas rien quand même ! »

Je pense que cet échange est dans le top 3 des fois où j’ai fait rire ma psy dont j’oublie parfois que sa patientèle n’est pas exclusivement constituée de profs névrosés comme moi.

Et ça me rappelle combien nous sommes une espèce un peu à part tout de même.

Non, ce n’est pas rien d’être inspecté. Je sors de deux semaines d’insomnie et de charge mentale maximale pour deux heures de mon existence.

On en discutait en salle des profs et c’est sans appel, la majorité des profs a le « syndrome du bon élève ». Nous mettons derrière l’inspection tout ce que les élèves mettent derrière leur évaluation :

  • Le besoin de reconnaissance et de validation
  • L’envie de briller dans les yeux de celui qui constitue l’autorité pédagogique
  • Le désir que tout soit propre et joli comme des cahiers d’école

Et ça rend zinzin !

Depuis que les « rendez-vous de carrière » ont remplacé l’inspection traditionnelle, les dés sont tellement pipés qu’ils ne comportent quasiment aucun enjeu. Cela dit, je pense que ce qui se joue en tant qu’individu n’a pas changé. Je veux dire à moins d’avoir atteint un niveau de recul ou de détachement de moine shaolin… et encore ! Qui se fout véritablement de son inspection ? Qui est serein à ce moment ?

Déjà « sérénité » chez moi ça reste une définition dans le dictionnaire, ça n’a jamais dépassé le stade de concept.

Toute la journée j’avais en tête une réplique du dernier métro  « c’est comme les chiottes ou le cimetière, quand faut y aller, faut y aller ! »

J’étais tellement vidée après que ça m’a donné la migraine.

Il y a vraiment quelque chose qui se passe en nous, qui nous rappelle qu’on n’a pas dépassé certaines choses, qu’on a juste poussé la poussière sous le tapis.

C’est comme l’agrégation, on peut se cacher derrière des motivations pécuniaires ; c’est un leurre. La vraie motivation, celle qui fait qu’on ne dort pas pour rendre un devoir c’est pas l’argent, c’est bien plus profond que ça. C’est cette même chose qui fait qu’on ne se lance jamais  d’ailleurs.

Ça questionne et ça remue dans les tréfonds de l’âme où il ne fait pas plaisir d’aller gratter. Trouver les réponses à certaines questions, c’est pousser des portes dont on ne poura peut-être pas revenir indemnes.

« Pourquoi ai-je tant envie de réussir ? » Et pire encore, « qu’est-ce que cela dit de moi si j’échoue ? »

Mystère…

Enfin, vous l’aurez compris, je n’ai pas fini de voir ma psy.

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