Rentrée des classes… en novembre

J’avoue ne pas trop savoir comment commencer ce texte.

Le blog est en jachère depuis 3 mois mais comme je n’ai pas tellement la main verte, je ne sais pas si la production en sera meilleure.

Bon… il se trouve qu’en septembre je n’ai pas fait ma rentrée.

En réalité, je l’avais faite fin août. Je devais d’ailleurs vous raconter cette semaine avec mes 3e (ceux qui sont en seconde maintenant) en train de déclamer du Cyrano au milieu de la cour du collège.

Et puis j’ai été arrêtée au milieu de la piste de décollage.

Un petit trésor caché au fond de mes entrailles nous a fait quelques frayeurs et après nos galères de l’année passée, le docteur a opté pour le principe de précaution.

Alors je me suis dit que j’allais mettre ce temps à partie pour bûcher l’agreg et trouver des innovations pédagogiques démentes.

Ça c’était le 1er septembre.

Puis à partir du 2, j’ai alterné entre envie de vomir tripes et boyaux et siestes du matin, de l’après-midi et parfois du soir. Je peux vous résumer chaque épisode de la star ac mais pas vous citer une ligne de Proust.

Cette année sera une année très spéciale… tellement spéciale que je ne fais ma rentrée que demain.

J’ai peur comme une néo-titulaire.

Et puis j’ai très envie de revoir les copains et de rencontrer mes élèves.

J’ai des papillons dans le ventre avec des gargouillis de trac.

Mais bientôt plein d’histoires à raconter.

Carte postale

Le soleil, de plus en plus en avance pour se coucher, nous rappelle que l’été touche à sa fin.

A la différence de beaucoup, nous, pouvons fêter deux fois la nouvelle année.

Une fois avec le reste du monde le 31 décembre.

Une fois avec les écoliers de France.

En ce 26 août, je tenais à te souhaiter une très belle nouvelle année.

Je te la souhaite douce, riche, pleine de surprises, de rires, de joie, de rencontres et de projets.

Parfois, commencer une nouvelle année peut laisser place à une certaine mélancolie.

Est-ce que de belles choses m’attendent encore ? Est-ce que les meilleures années ne sont pas déjà passées ?

Je suis certaine que ce nouveau chapitre sera d’anthologie.  

La vie offre toujours un chemin.

Fais-lui confiance.

Je t’embrasse fort

Le méga blues du dimanche soir

Coucher de soleil, vent froid qui secoue les branches qu’on aperçoit moins bien à travers la fenêtre, lumières déjà allumées. La grande tasse est vide ; il ne reste au fond que des marques de passage du thé au caramel et les miettes de biscuit tout autour. Il n’est que 17 heures.

Cette lumière entre chien et loup appuie fermement sur la poitrine.

Les copies sont corrigées, les notes rentrées, même le sac est bouclé.

Quel problèmes de riche après deux semaines de congés, quelle indécence d’oser avouer… qu’on n’a pas envie de rentrer.

N’oublions pas que nous autres, profs n’avons jamais quitté l’école. On est juste passés de l’autre côté du bureau. Et comme les élèves :

il y a celui qui a planqué son cartable pendant toutes les vacances et qui fait les devoirs le dernier jour, le couteau sous la gorge. « Bien sûr que je peux corriger 100 copies aujourd’hui ! Je suis large ! »

Il y a l’intello consciencieux qui a tout corrigé la première semaine et monté des projets la deuxième. « Oui, je me suis reposée, je n’ai travaillé que les matinées. J’ai corrigé quelques dizaines de rédactions, rebâti toute ma séquence pour mes troisièmes, et préparé le devoir commun des quatrièmes. Ne pas travailler ça me stresse trop et de toutes façons je me lève à 6h30 naturellement.»

Il y a celui qui procrastine en remettant à plus tard la longue liste de tâches qu’il avait longuement planifiées pour ces vacances. « Je vais avoir un tunnel de temps ces vacances, terminé le stress de la dernière minute cette fois, je m’organise. Je change tout. » Ellipse. « Non mais moi, je fonctionne mieux dans le stress. Je suis beaucoup plus performant. »

Haut les cœurs ! On va revoir les copains, mettre ce nouveau pull qu’on a acheté pour frimer, râler contre le réveil qui sera venu trop tôt et le sommeil trop tard.

Les vacances d’automne ont cela de particulier : elles sentent bon le potiron mais ramènent la mélancolie des feuilles mortes. Aller, on se dira qu’ils nous ont presque tous manqués et que c’est joli tout de même, les rayons de soleil mêlés aux couleurs de saison.

En attendant que la nuit daigne tomber, et couvrir de son plaid réconfortant les âmes sensibles, se couler dans un bain chaud à se friper la peau.

Demain, ils seront là et ce sera comme à chaque fois, comme si on ne s’était pas arrêtés.

la petite fiche de rentrée

Cela fait quelques temps que je rumine régulièrement à mon cher et tendre la même chanson « j’ai envie de revoir toutes ma pratique pédagogique, il faut que je m’adapte davantage à eux, que je prenne en compte leur développement cognitif, blabla… » #stanislasdeheane

Vaste chantier vous le conviendrez.

Quelques interrogations et prises de recul s’imposent dans ma pratique de la lecture, de l’écriture et dans tous les domaines possibles. J’y réfléchis de façon récurrente.

Mais il y a une heure de cours que je n’ai jamais modifiée depuis ma première rentrée c’est la toute première heure de l’année. Vous savez cette heure un tantinet inutile où on ne fait pas grand chose si ce n’est remplir la page de garde du cahier / classeur et feuilleter le manuel…

Depuis 5 ans,  je distribue les mêmes documents. C’est ma tutrice de stage qui me les avaient donnés et je ne les avais jamais modifiés. Ma tutrice a été d’une telle richesse et d’une telle bienveillance qu’il ne m’est jamais venu à l’esprit de commencer l’année autrement. Et depuis, comme pour me porter bonheur, je distribue à chaque rentrée les mêmes règles de classe à respecter, le tableau d’évaluation du classeur, etc.

Cette année, Stanislas Dehaene et Catherine Guéguen m’habitant, j’ai décidé de m’émanciper de mes fétiches et de repenser ma toute première heure de cours.

Je n’ai pas réinventé l’eau chaude ni la poudre (les collègues font sûrement cela depuis belle lurette) mais j’ai essayé de modifier mon angle d’attaque.

Plus inexpérimentée, j’avais besoin de débuter l’année par des règles pour bien fixer les choses au cas où les élèves se mettraient à daber debout sur les tables en chantant du Maître Gims. Et ça marchait puisque mes élèves n’ont jamais eu ce comportement.

Cette année, j’ai axé ma première heure sur le plaisir d’apprendre, les livres que l’on allait découvrir ensemble, je leur ai présenté deux séquences différentes et je leur ai fait choisir celle qui leur faisait envie en les prévenant que toutes les séquences finiraient par être traitées dans l’année.

J’ai eu des sourires, des « oh ouai », des rires (ils sont gentils ils rient à mes blagues nulles)

Il me restait à régler le problème de « la fiche de présentation ». Je trouvais compliqué de débuter sans que l’on se présente. En même temps, telles que je les faisais avant je ne les lisais pas, elles restaient des mois dans mon sac jusqu’à finir à la poubelle. Véridique.

Et puis, avec Pronote les informations pratiques on les retrouve en un clic pas la peine d’avoir des archives. Et c’est très intrusif finalement de demander quelle est la profession des parents, s’ils ont des frères et sœurs, etc.
Alors quitte à être indiscrète, j’ai posé des questions encore plus personnelles: s’ils aiment lire, ce qu’ils lisent, s’ils ont des difficultés, ce qu’ils rêvent de devenir et s’ils ont une idée de comment s’y prendre pour réaliser ce rêve.

J’ai également créé une fiche d’objectifs à remplir trimestre par trimestre dans laquelle je leur ai demandé de définir 3 objectifs à atteindre: des objectifs simples et réalisables (écouter les cours, participer, relire son texte…) dont l’ampleur et les difficultés pourront s’accroître au cours des trimestres suivants. L’idée était de leur faire comprendre que toutes les bonnes résolutions ne peuvent tenir si les objectifs visés sont inatteignables.

Et seulement à la fin de l’heure je les ai avertis de ce qui se passerait en cas de travail non faits mais j’ai pris le risque de ne pas en faire une trace écrite, c’est un contrat verbal entre eux et moi. Pour les encourager, à la sanction négative s’oppose une sanction positive: si les règles sont respectées alors ce sera valorisé dans la moyenne. Ils auront ainsi un intérêt à bien se comporter. Encore une fois, mon idée est de quitter un peu le côté discipline pour instaurer une relation de confiance. S’ils font ce que j’ai prévu pour eux, ils vont progresser c’est garanti mais il faut que je gagne leur confiance pour qu’ils me suivent et de fait je leur

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balise le terrain.

Nous verrons si j’ai été trop souple ou si ce nouveau parti-pris va porter ses fruits.

Je vous tiens au courant !

 

La rentrée

Nous arrivons aux vacances de la Toussaint et j’en suis encore à vous raconter la rentrée. Il va falloir que j’accepte l’idée que je n’arriverai jamais à suivre le calendrier scolaire ni à être régulière ici…

J – 5 : il fait chaud et cela fait déjà depuis début août que j’ai le cerveau qui mouline sur la reprise. Auto-torture quand tu nous tiens. Par dessus le marché me voilà avec la gastro du siècle, oui, par 30°. Je suis enchantée: le stress de la rentrée combiné au stress de ne pas être en état de la faire.

J- 3: je me décide à aller voir un médecin pour qu’il me donne un traitement de choc. j’aurais pu y aller plus tôt, j’en conviens. Il paraît qu’on est nombreux à être dans cet état.

Je veux pas y aller.

J-1: ça commence à aller mieux je tiens debout. La pré-rentrée des profs c’est demain et je dois être dans deux collèges, je décide d’aller faire un tour dans le plus éloigné (50km de la maison) pour m’éviter deux voyages demain. Mon super mari m’accompagne. « On ira se promener avec le bébé en t’attendant ». #coeuraveclesdoigts

« Alooooors Madaaaame Selroux, vous avez… Ah ? Je ne vous trouve plus. Tiens c’est curieux.  »

Pendant quelques secondes, j’ai rêvé que mes heures avaient été transférées dans l’autre établissement, envolées la REP + et la ZUP, terminé le quartier difficile, le…

-ça y est ! Je vous ai. Je ne vous trouvais pas parce que vous avez deux classes partagées.

-Pardon ?

-Oui. Vous avez 4h30 avec nous (soit le nombre d’heures de français d’une 6e complète), 2h avec la 6eDifficile et 2h30 avec la 6eExplosive. (j’apprendrai plus tard que c’est l’inverse en fait)

-Vous les partagez avec M. F. Vous le reconnaîtrez facilement c’est un grand africain.  »

Alors commence la tournée des mails pour contacter M. F, Jojo de son petit nom, très sympa, mais qui m’apprend que je ne partage qu’une classe avec lui. Mais alors, avec qui je partage l’autre ? Mails à toute l’équipe de français que j’ai retrouvée en faisant les emploi du temps de toutes les classes sur Pronote afin de savoir qui était mon 2e binôme. Pas de réponse. ça va être simple cette histoire. Improviser en REP +, c’est hyper recommandé. Bon, advienne que pourra, de toutes façons tout le monde a l’air de naviguer à vue.

Demain je pars au pays de l’eau en bouteille pour la prérentrée.

Si vous croyez que les élèves ont le trac de la rentrée, vous n’avez pas vu un prof avant la reprise. Personnellement, je suis aussi stressée qu’à ma première rentrée. Être le complément de service-de service, ce n’est pas très confortable.

Je veux pas y aller !

J’ai envie de me rouler par terre et taper du poing.

D’abord, je suis sûre qu’ils sont pas beaux et pas sympas ces élèves. En plus, avec ceux de l’année dernière on avait des liens très forts, ça sera jamais pareil.

Je veux pas y aller.

Je veux retourner dans mon collège au bord de l’eau, reprendre la route aux flamands roses, retrouver les collègues trop sympas.

Aller c’est reparti, on reprend l’autoroute. J’ai déjà fait ce collège et j’y étais bien. L’A9 a changé mais la voiture n’a pas oublié la route. Première sortie, deuxième, troisième… nationale, feu rouge, ah oui radar au feu, même parking.

Bon, il faut y aller là.

J’avance lentement, les mêmes graviers, la même entrée par la salle des profs et là j’entends

« Eh mais c’est Juliette ! »

Quoi ? Ils ne m’ont pas oublié ? Mais c’était il y a deux ans !

La bise à tout lob_4840c9_38e monde, on prend des nouvelles, on exhibe sa progéniture.

C’est reparti pour une nouvelle année.